— Par Max Dorléans et Marcel Sellaye (GRS) —
On sait que depuis leur prise de fonction à la direction du CHUM en lieu et place de l’ancien directeur Estienne – mis de côté pour n’avoir pas réussi ou plutôt avoir trop tardé dans la mise en place des mesures draconiennes – le trio des inspecteurs dépêché par la ministre de la Santé, fait la chasse, en silence et sans véritable pression syndicale ou autre, à tout ce qu’ils estiment inefficient pour le fonctionnement de l’hôpital. C’est d’ailleurs le sens de leur lettre de mission qu’ils poursuivent visiblement sans perturbation majeure, sans trop de soucier des exigences de fond de la communauté des médicaux, paramédicaux et autres, à qui l’on demande de travailler toujours plus, sans tous les moyens nécessaires, mais avec leur seule conscience professionnelle.
Dans ce même ordre d’idées, et évidemment en droite ligne des orientations austéritaires déjà prises, le chef du gouvernement et la ministre de la Santé viennent d’annoncer le lancement prochain de « concertation à tous niveaux » et de « réflexions intenses » d’une durée de 3 mois (mars à mai) pour aboutir à une réforme « globale, cohérente, méthodique » de l’ensemble du système de santé, estimant que « le temps des rafistolages est révolu ».
Le gouvernement ayant déjà arrêté les « cinq grands chantiers » sur lesquels devront plancher autorités, experts et citoyens, il devrait s’agir pour le « Collectif Douvan Douvan » et/ou les organisations syndicales, de les aborder sans crainte, mais avec leurs propres réponses. C’est-à-dire se saisir de cette opportunité pour faire entendre leurs points de vue, et surtout pour associer, comme prévu, la population à la lutte pour un CHUM digne de ce nom, et plus largement pour un véritable service public hospitalier en Martinique.
Il se peut qu’ici en Martinique, au vu de la lettre de mission entre les mains du trio, la discussion sur les « cinq grands chantiers » ne prenne pas la même forme qu’en France. Reste que cette lettre englobe peu ou prou les questions en débat à venir. Puisqu’il s’agit de « qualité et pertinence des soins », de « modes de financements », de « développement du numérique », de « formation des professionnels de santé », de « gestion des ressources humaines à l’hôpital et d’organisation territoriale de ces derniers » d’une part et d’autre part sur les questions de « regroupements d’hôpitaux », du « virage ambulatoire », de la « modification de la T2A » ou encore de l’ « instauration d’un service sanitaire pour les étudiants en santé ». Et que la question cruciale pour le trio est la l’amélioration de la productivité, qui passe fondamentalement pour eux, par la réduction des effectifs.
Prenons l’exemple de la « tarification à l’activité » (T2A). Après avoir été présentée depuis 15 ans comme la formule miracle pour financer les établissements hospitaliers, voici aujourd’hui Buzyn qui la déclare « arrivée au bout d’un système » et responsable pour les personnels de « la perte de sens » de leur métier. Une déclaration qui fait suite à sa récente dénonciation de ses effets pervers, notamment celui relatif à la course à la rentabilité à laquelle elle pousse, par la multiplication des actes qui rapportent le plus. Et qui par ailleurs s’est réalisée depuis sa mise en place, au détriment des malades et d’une utilisation rationnelle et intelligente des ressources de la Sécurité sociale.
Une déclaration donc sur la T2A, à mettre en relation avec une autre question en débat à venir, et qui concerne la « qualité des soins ». En effet comment vouloir partout une qualité des soins, et dans le même temps pousser, au nom d’une supposée « qualité insuffisante », à la des fermetures de lits, de services et d’établissements. Comment en effet ne pas comprendre que « la perte de sens » de leur métier par les personnels, et encore le recul de la qualité des soins que reconnaissent les syndicats et personnels, sont précisément dus à la réduction des effectifs, à la dégradation des conditions de travail, au travail en permanence en flux tendus, au manque ou à l’insuffisance de matériels et de moyens, à l’impossibilité pour les personnels de prendre leurs repos salutaires et de se former…
Alors ne boudons pas le plaisir de nous opposer clairement et fermement à Buzyn dont la l’objectif est de réduire les déficits et les dépenses publiques. En l’occurrence de mettre les hôpitaux sous pression en leur imposant toujours plus de contraintes budgétaires. Ce qu’elle entend voir réalisé avec le trio d’inspecteurs à la tête du CHUM pour quelques mois encore, par une réduction de la masse salariale, donc des effectifs. Ce qui évidemment est à l’opposé des intérêts de la population.
C’est cette orientation mortifère que nous devons combattre pour construire un véritable service public hospitalier et de santé en Martinique. Cependant notre noble objectif a pour fondement principal, la mobilisation de la population.
Max Dorléans et Marcel Sellaye (GRS)