16 décembre 2016 à 9h30 au T.A.C.
— Par Roland Sabra —
Représentations scolaires.
Une paire de chaussures, sans lacet, s’embrassaient à boucle que veux-tu, se roulaient des patins et des galoches au delà de toute raison et de l’intérêt de l’ami-pied qui les portait. Se mêle à l’histoire, une dame gentille, un médecin un peu bête, une voisine boiteuse et des enfants gentils comme tout. Les enfants sont toujours gentils. Enfin presque toujours. En vrai pas toujours. Et même des fois pas du tout, mais bon ce serait une autre histoire…
L’histoire, celle qui est racontée, issue du livre de Pierre Gripari, La sorcière de la rue Mouffetard et autres contes de la rue Broca, s’appelle à l’origine La paire de chaussures qui elles mêmes s’appelaient Tina et Nicolas. Laurence Couzinet-Letchimy qui a adapté le conte pour le théâtre a procédé à quelques changements. Tina et Nicolas sont désormais Max et Louise, pardon Louise et Max, mais pour le titre elle à gardé le nom du garçon en premier. Elle a ajouté des dialogues, enlevé des personnages, une femme de ménage voleuse par exemple, mais elle a conservé l’essentiel. Au fait de quoi est-il question plus précisément dans cette histoire de tatanes amoureuses qui étaient bien peinardes dans leur boîte avant qu’une cliente ne vienne les acheter et les mettre à ses panards? Pour marcher il faut avancer un pied devant l’autre, comme chacun sait faire. Enfin il faut l’espérer. Mais voilà quand Max, la chaussure droite est devant, Louise la chaussure gauche est forcément derrière. Elles se séparent. Elles ne peuvent plus se bécoter à longueur de temps. O rage O désespoir de l’éloignement. Max à donc l’idée de faire un pas de coté pour déposer un baiser sur la joue ou peut-être les lèvres –l’histoire ne le dit pas- au moment précis où les deux pieds vont se croiser ce qui va se traduire par un croche-pied non recherché pais pourtant inévitable. Et la propriétaire des chaussures de trébucher sans cesse et de se demander le pourquoi de la chose, et d’aller consulter un médecin, un peu bandit, et de se voir proposer comme remède ni plus ni moins qu’une amputation du pied gauche. Ce qui il faut bien le dire n’arrange en rien les affaires de Max et Louise car si la dame est unijambiste pour les baisers ce ne sera pas le pied, comme on dit. On ne va pas raconter la suite, au lecteur de faire la démarche d’aller voir la pièce ou de lire le conte.
Laurence Couzinet-Letchimy n’est pas restée les deux pieds dans le même sabot. Non seulement elle a réalisé l’adaptation mais en plus elle se met en scène. Elle est vive, souple, son passé de danseuse est encore bien présent et elle le montre avec bonheur, elle sait que les publics d’écoliers sont des publics intransigeants avec lesquels il ne faut pas tricher. Ça passe ou ça casse. Et depuis 2012 date de création de la pièce ça a toujours passé avec talent. Sur scène elle semble avoir toujours un peu le tract, un peu tendue, à l’écoute de la salle, provoquant, anticipant les réactions de l’auditoire qu’elle aime et qu’elle respecte. Aucun doute la-dessus. Elle ne considère pas son public comme un public mineur, un public de second rang. Elle sait d’expérience qu’il s’agit là d’un public à part entière et à coup sûr exigeant. Et comme elle sait y faire celui-ci adhère, participe à l’histoire.
Celle-ci dans sa narration s’étire un peu. Elle mériterait d’être plus ramassée, plus serrée. Pédagogue dans l’âme au deux tiers du spectacle elle interroge la salle pour une résumé, pour vérifier que tout le monde a bien suivi. C’est le cas. Plus tard elle invite deux ou trois spectateurs à venir sur scène partager les médocs, des bonbons multicolores en l’occurrence, dont la propriétaire ne veut plus pour des raisons qu’on ne dévoilera pas. Les intentions sont généreuses mais elles brisent la structure du récit et introduisent un côté kermesse au dépens de la magie théâtrale qui se construisait. De même la fin pouvait participer d’un univers féerique plus affirmé. Cela étant l’ensemble du spectacle est une réussite confirmée par de nombreuses représentations dans les écoles de France et d’ailleurs. On ne peut que lui souhaiter d’user de nombreuses paires de chaussures sur les routes d’un succès mérité. Enfants : emmenez vos parents! Ils vont apprendre.
Fort-de-France, le 13/12/2016
R.S.
Max et louise
Adaptation du conte « Les chaussures » de Pierre Gripari
par et avec Laurence Couzinet-Letchimy
Compagnie Car’Avan
lres 13-15-16 décembre 2016 à 9h30 + à 14h30 le Mardi 13 + à 14h le Jeudi 15 au T.A.C.