18 & 19 novembre 20h – salle Frantz Fanon. FdF.
23 novembre 19h au Carbet
— Vu par José Alpha, le dimanche 13 novembre 2016 au Marin —
En épousant Angélique Sotenville incarnée ici par l’impétueuse Daniely Francisque, le paysan fortuné Georges Dandin créé par Molière le 18 juillet 1668 à Versailles à la demande du Roi Louis XIV, espère s’élever au-dessus de sa condition pour faire partie de la noblesse de la cour. Seulement la jeune femme trompe son mari et chaque fois que Dandin tente de la confondre, celle-ci l’humilie en retournant la situation contre lui, le faisant passer pour un goujat, au point de demander à ses parents de la libérer de cette union trop contraignante pour sa jeunesse.
« Monsieur de la Dandiniere » (Patrick Womba) , le père d’Isabelle et son épouse Mme Sotenville (Lucette Salibur) qui voient dans la fortune de Dandin le moyen de renflouer leurs affaires, feront tout pour sauver les apparences et garder la dot de l’ambitieux mari.
Cette farce populaire en trois actes de Molière qui n’est pas la plus célèbre, a fait pourtant l’objet de plusieurs adaptations plus ou moins réussies. L’intrigue ne reposant que sur les humiliations subies par Dandin (Joel Jernidier), bénéficie généralement d’une mise en scène dynamique et joyeuse, agréable à jouer et à vivre avec les ressorts de la Comédie del Arte chère au dramaturge Jean-Baptiste Poquelin Molière.
Or, le choix proposé par Hassan Kassi Kouyaté, directeur de la Scène nationale de Martinique, dimanche dernier au Marin, lors de la première de Georges Dandin sous le nouveau chapiteau de la Scène nationale de Martinique, nous donne malheureusement à voir une pathétique et agaçante imitation des gestes et postures d’une époque où « le nez en l’air » et l’emphase langagière mal maîtrisée caractériseraient une catégorie sociale dominante.
Mais le propos tenu ici ne se résume pas seulement à la mauvaise pantalonnade qui du reste pourrait constituer « une parodie des maîtres » jouée par les esclaves des « rues case nègres » des colonies pour se moquer des possédants engoncés dans la rigidité et la stérilité des « corps-troncs » ; il faut observer et dire objectivement que la première carence et non des moindres, est en effet l’absence de rythme enlevé de la pièce, et par conséquent des jeux, des chants sans conviction et souvent à contretemps, et enfin la méconnaissance du swing de l’ensemble . Où est passé le panache cathartique de la comédie ? Où est le swing des interrogations, des réparties et des mensonges ? Assombries par une « nuit de l’intrigue » pourtant bien entamée avec les lampes de poches en levée de rideau ?
Tout çà malheureusement aplati et pénible à accepter par des spectateurs qui connaissent parfaitement ces situations et ces personnages aisément repérables encore aujourd’hui.
Les performances bridées des comédiens certainement plus émus par la première sous le nouveau chapiteau du Tropiques Atrium installé au Marin pour la circonstance, ont malheureusement escamotées la triste impuissance de Dandin, les trahisons de la jeune Isabelle, la duplicité familiale, et puis l’esprit de divertissement nécessaire à la conquête des publics éloignés des centres culturels et théâtre des villes.
Jouer Molière ne se résume pas à chercher à tout prix à identifier la pédanterie, l’ampoulade et les manies comme traits de caractère qui déclencheraient le rire et le bien-être populaire. Jouer Georges Dandin consiste surtout, me semble-t-il à éviter le piège balourd du drame social, au profit d’une distanciation moqueuse, légère et pourquoi pas préventive de l’incontournable réussite sociale.
Gageons que la formation des comédiens distribués se poursuive au bénéfice d’une meilleure facture des prochaines représentations.