— Par Roland Sabra —
Felipe Cabrera, que l’on avait vu, le 31 oc
tobre dernier lors du rendu de résidence à Fonds Saint-Jacques et qui, ce soir-là avait semblé en de-ça de son talent a donné toute sa mesure lors de la soirée de clôture des spectacles en salle du MJF2015 au Tropiques-Atrium. La prestation s’est articulée autour du dernier opus, « Night Poems » paru en février 2015 et réalisé avec le pianiste Léonardo Montana. Il y avait beaucoup d’émotion sur scène et dans la salle. Après avoir sillonné les scènes du monde entier auprès de Gonzalo Rubalcaba durant quinze ans avec un quintet placé sous le parrainage de Dizzie Gillespie, Felipe Cabrera commence un longue carrière de collaborations internationales, souvent en fonds de scène mais toujours remarquées, auprès de Julien Loureau, Chano Dominguez, David Sanchez, Chico Freeman, Arturo Sandoval, Eddie Palmeri, Chris Potter, Omara Portundo, Mayra Andrade…
La chrysalide a donné son imago tardivement puisque Night Poems n’est que le troisième album du bassiste sous son nom. Discrétion et humilité sont peut-être les autres faces d’une sensibilité à fleur de peau qui expriment grâce, raffinement et exigence esthétique. A cet égard « San Cristobal » (écouter ci-après) est un petit bijou du genre, entre musique de chambre et ballade nocturne au clair de lune sur le Malecon, le vrai celui-là. Cette musique réalisée à deux a le mérite de pouvoir être jouée en en trio, en quartet voire en quintet. L’invitation du jeune batteur guadeloupéen Arnaud Dolmen en a été la démonstration fulgurante. Déjà remarqué à Fonds Saint-Jacques il a fait preuve d’une sensibilité et d’une intelligence musicale, notamment au niveau rythmique assez exceptionnelle. Ne jouant jamais pour lui-même, il n’a jamais été en simple accompagnement des œuvres de Cabrera et Montana mais toujours en dialogue et communion avec elles. Arnaud Dolmen : un nom à retenir.
Richard Bona : hâbleur, séducteur mais toujours talentueux
A cette première partie plutôt poétique et presque intimiste à succédé Richard Bona. Un autre monde, un autre univers. Hâbleur, rappelant au public ses concerts aux quatre coins du monde, séducteur avec ses clins d’oeil à la musique locale, talentueux avec cet art qu’il n’a pas forcé il s’est assuré que son charme opérait toujours auprès de cette vieille conquête qu’il n’est plus besoin d’enlever tant il est vrai qu’elle s’est déjà donnée. Il était accompagnée d’une formation cubaine dans son essence, piano, trompette et batterie, avec une guitare aux mains d’un jeune brésilien venu du centre de convergence des cultures amérindienne, africaine et européenne , Salvador de Bahia. Musiciens professionnels ils sont venus, ils ont joué, ils sont fait ce pourquoi on leur avait promis un cacheton. Sans plus. Quant à Richard Bona cabotin il a été certes mais non pas pour masquer un manque de talents, il en déborde, comme on a pu l’entrevoir dans quelques éclairs, mais peut-être par fatigue, c’était son dernier concert de l’année, il n’a pas manqué de le faire savoir, ou bien alors était-ce par paresse. De la condescendance à l’égard d’un public antillais ? Non, pas cette injure quand bien même il situe Fort-de-France en Guadeloupe !
Richard Bona ? Peut mieux faire!
Fort-de-France, le 29/11/2015
R.S.