—Par Janine Bailly —
À la galerie La Véranda, sise à l’étage de l’Atrium (c’est plus joli que EPCC, non ?), une exposition originale se donne à voir pour quelques jours encore.
Si Dora Vital a baptisé cette présentation « Chemins d’imaginaires », elle n’a pourtant pas affiché de titres auprès de chacune de ses œuvres, comme cela se fait assez ordinairement. Elle vous en donnera volontiers la raison, puisque, présente, passionnée autant que souriante, elle vous parle volontiers de son choix : de cette façon, elle nous laisse libres de voir et d’entrer dans ses toiles avec notre imaginaire personnel, libres de créer notre histoire en laissant courir notre imagination. Elle aime aussi observer comment un visiteur se laisse surprendre lorsqu’il compare ce qu’il avait cru deviner – ou ce qu’il avait ressenti – à ce que suggère le titre révélé sur la liste consultable en fin de parcours. Car c’est bien d’un parcours qu’il s’agit, d’un voyage en des terres réelles ou fantasmées, en des pays existants ou imaginés. Et les titres finalement chantent à l’oreille, comme ces « Murmure matinal », « Abysse pourpre », « Erg », « Ciel de traîne », « Tendre tourment », ou l’étonnant « Grand froid dans un intérieur chaud ».
Plusieurs triptyques retiennent l’attention, qui déclinent un thème fracturé sur des supports tantôt de même taille, tantôt de tailles différentes. Prolongeant le dessin, quelques racines ou lianes torturées, suspendues sur les murs blancs, ajoutent à l’esthétisme et ouvrent encore les horizons.
Les œuvres sont réalisées sur des supports rigides, contreplaqué marine et bois, que l’on peut travailler, gratter, recouvrir, la toile s’avérant trop fragile pour ce faire. Les matériaux ? De la peinture acrylique, du plâtre, des pigments, de la feuille d’or parfois, et la résine qui apporte un relief discret mais saisissant, cette dernière n’étant pas, comme certains auraient tendance à le dire, « une finition », mais un élément qui s’intègre entièrement à la création. Cela, Dora tient à bien nous le faire comprendre, ce en quoi elle a raison !
Regarder les créations de Dora, c’est entrer dans un rêve, c’est oublier un instant la cruauté du monde extérieur, c’est se trouver, et je citerai ici Dora elle-même, c’est se trouver « un refuge, une Thébaïde », c’est emprunter « des chemins parfois abrupts à parcourir sereinement ».
La visite finie, me reviennent alors en mémoire ces quelques vers de Baudelaire, leitmotiv du poème “L’invitation au voyage” :
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté
De ce même poème, je garderai, pour évoquer cette installation où tout « parlerait à l’âme en secret », les « senteurs de l’ambre », les « miroirs profonds », les « soleils mouillés », les « ciels brouillés », puis encore « hyacinthe et or », qui sont à la fois couleurs et matières.
Si ce n’est déjà fait, courez-y vite , et faites moisson d’images !
Fort-de-France, le 23/02/2015
Janine Bailly