— Par Philippe Petit, Président de l’UDI Martinique —
Dans toute économie moderne, le mot croissance est la base de l’augmentation du produit intérieur brut (PIB) de chaque pays. C’est la pédale d’accélérateur destinée à augmenter le train de vie de la nation avant la répartition juste des richesses créées.
Répartition qui ne peut se faire que si la dette créée par l’Etat l’autorise… !
Aujourd’hui, la croissance étant absente de la zone euro (nul doute qu’elle reviendra avec la transition énergétique et les métiers induits -à développer dans un prochain courrier-), ce qui nous intéresse, c’est la pédale de frein destinée à stopper le poids sans cesse grandissant de la dette.
Les générations futures ne doivent payer pour nous notre incurie et notre gabegie !
A en croire les économistes de la gauche dite « classique » (la gauche de la gauche, marxiste ou post-marxiste), l’Etat français pourrait vivre à crédit en permanence en augmentant le déficit budgétaire et donc la dette publique à souhait, selon la politique dite « de la demande »…
Outre qu’ils sont en contradiction avec eux-mêmes -puisque les prêts de l’Etat négociés sur les marchés financiers mondiaux sont bien dans la logique de la Bourse et de la mondialisation qu’ils exècrent…-, ils induisent aussi la notion morale naturelle de surendettement des ménages… dont on connait les ravages économiques et psychologiques !
Dans nos boutiques des années 60, une affiche de bon sens expliquait : « Crédit est mort, les mauvais payeurs l’ont tué » pour signifier que le patron ne pouvait plus ouvrir de compte de paiement différé et était obligé -et donc obligeait- ses clients à payer au comptant !
Aujourd’hui, si la France était un ménage classique, elle serait versée à la commission de surendettement avec interdiction de chéquier et inscription à la Banque de France ; si elle était une entreprise privée, elle serait déjà depuis longtemps en redressement judiciaire avec la menace d’une liquidation… et d’un repreneur potentiel qui serait un concurrent.
En redressement, on lui étalerait ses échéances de remboursement, on lui ferait un plan d’apurement des dettes fiscales et sociales ; et, en absence de croissance, ayant alourdi au maximum les prélèvements obligatoires (impôts directs et indirects, sécurité sociale, assedic, etc…), on l’obligerait à dégraisser sa masse salariale, en diminuant les salaires de la fonction publique et des prestations sociales, ou en licenciant à tour de bras.
L’austérité potentielle alors imposée par le durcissement des marchés financiers déclencherait ainsi la colère populaire. Ce scénario s’est vu en Espagne et au Portugal l’année dernière.
Et les peuples en sont rarement quittes avec un seul plan d’austérité. A quatre reprises, le chef de l’Etat portugais, José Socrates, a dû couper dans les dépenses publiques, et, lorsqu’il s’est heurté au refus du Parlement, le pays s’est vu imposer ces mesures par le FMI et par l’Union européenne.
Les Français supporteront-ils cette relation conflictuelle avec les marchés financiers et les partenaires européens et/ou mondiaux ?
A en croire les économistes du Front National, il suffirait de sortir de l’euro, de reprendre le franc et de nous replier sur nos frontières en dévaluant notre nouveau franc pour favoriser nos exportations… Double langage puisque ce même Front National admet par la même un marché mondial –des biens, des services et donc des personnes… dont ils refusent l’immigration (alors que la France est un peuple de différentes couches d’immigrés)-.
Hérésie financière puisqu’il faut rembourser notre dette en dollars ou en euros avec un franc dévalué… Sans compter une récession économique, le temps de rétablir notre balance commerciale, puisque nous serons dans un premier temps tributaire d’importations avec une monnaie plus faible, entraînant l’inflation et toutes ses conséquences…
Pour les aficionados de Tabou Combo dans les années 80, qu’ils se souviennent du tube « inflacion mata la gente » (l’inflation tue les gens). Pour rester dans le langage sud-américain et dans l’actualité, le cas d’école en la matière reste l’Argentine. Incapable de respecter la moindre discipline budgétaire, sombrant dans l’anarchie monétaire, elle ne put éviter, en 2001, un défaut de paiements qui la mit au ban de la société financière et donna au monde le premier exemple d’un pays développé en voie de sous-développement… Les Argentins ont plongé dans un malheur indescriptible, et, après dix années de cauchemar, ils en subissent toujours les séquelles.
Les français voudront-ils tomber dans le panneau du Front National, casser l’euro, défaire l’Europe, et préparer une nouvelle guerre mondiale telle que certains, toujours vivants, l’ont vécue en 39-45 ?
Il nous resterait donc le choix entre la route de l’Espagne ou du Portugal et celle de l’Argentine. D’un côté, une coopération colérique avec les autorités financières internationales ; de l’autre, une rupture sauvage, un repli sur soi, une dénonciation de nos dettes et de nos créanciers qui pourraient nous ramener aux cauchemars des siècles passés…
C’est dans ces conditions que la gauche actuelle au gouvernement vient de réaliser que nous sommes dans un monde libéral avec des règles économiques à respecter ! La politique de l’offre ! Manuel Valls n’a d’autre choix que d’assumer son libéralisme au moment ou François Hollande, déjà englué dans les sondages par ses différents mensonges, se trouve rattrapé par l’affaire Trierweiler…
Pourtant, cela fait maintenant un quart de siècle que le mur de Berlin est tombé le 9 Novembre 1989. Pour les jeunes en âge de voter, de 18 à 35 ans aujourd’hui, cela ne signifie pas grand-chose… Et pourtant, ce n’est pas si loin… ! Notre société dite « capitaliste » regardait avec effarement de l’autre côté du mur, les ruines d’une économie socialo-soviétique dont on pensait qu’elle était viable et faisait le bonheur de ses habitants.
Plus que la privation de la liberté individuelle, la privation de la liberté d’entreprendre avait tué ce qui fait la richesse des hommes : l’échange commercial et la concurrence basée sur le progrès technologique au profit de l’humanité, dès lors que les ressources de la planète sont respectées.
Liberté d’entreprendre qui ne peut s’établir que sur des bases saines et claires ; absence de monopole, mais concurrence encadrée par des lois antitrust ; expansion du crédit pour de véritables projets à valeur ajoutée, mais avec des lois sociales souples permettant de ramener des exclus dans le monde du travail.
Nos socialistes français élus en 1981, sous l’étiquette « changer la vie » avec François MITTERRAND, avait pourtant déjà pris leur première leçon : le fameux tournant de la rigueur en 1983, montrant qu’on ne pouvait impunément augmenter les salaires et nationaliser le privé sur des déficits budgétaires de l’Etat de type keynésien.
Eux-mêmes portant étaient allés plus loin dans la gouvernance libérale avec Pierre BEREGOVOY en 1984 et la libéralisation des banques et la titrisation des crédits (opération par laquelle les banques transforment leur créance en titres financiers négociables sur les marchés).
Malheureusement, au gré des alternances et des cohabitations diverses, les mêmes énarques au pouvoir méconnaissaient les cycles économiques et ne profitaient pas des périodes d’expansion et de forte croissance pour diminuer les déficits budgétaires et donc l’endettement public. Ils préféraient laisser filer la dette plutôt que d’entreprendre de vraies réformes « structurelles ».
Alors que la dette publique était de moins de 20% du PIB en 1980, la France est passée aujourd’hui à 93.6% de son PIB quand les cycles économiques (d’environ 9 ans) traduisent une diminution régulière de leur pic de croissance. A noter que nous avons signé les critères de Maastricht avec 60% d’endettement au maximum !
De la même façon, dans un pays ou le niveau de prélèvements obligatoires est quasiment le record mondial avec 46% (quand le pays gagne 10, l’Etat prélève 4.60 € d’impôts), les dépenses publiques sont de 57%…, (soit 5.70 € de dépenses publiques quand la France gagne 10 €) ! alors que nos voisins en Europe ne dépensent que 45% au maximum.
Cela nous oblige à emprunter en permanence sur les marchés… pour assurer le train de vie de la nation à crédit. Qui nous dit que les taux resteront à ce niveau bas jamais atteint ? Une simple hausse des taux de seulement 1 point, augmenterait de 2 milliards la charge à rembourser dès la première année, et de 15 milliards au bout de 10 ans ! Et bonjour les dégâts !
Le nouveau ministre libéral, Emmanuel Macron, dans une interview du « Point », disait lui-même : « il ne semble pas que nous soyons plus heureux pour autant. La baisse des dépenses pour réduire le déficit n’est pas un impératif imposé de l’extérieur. C’est ce que ma génération se doit à elle-même et à nos enfants… »
L’UDI Martinique, à l’heure d’une croissance quasi inexistante, par le fait du manque d’investissement dû à la dette publique de la France, et au cercle vicieux de la dette privée due au prélèvement d’impôts excessif, ne peut que souscrire à ce discours !
Trois pistes s’ouvrent pour réaliser l’assainissement budgétaire.
Une refonte de l’Etat providence : le poids des retraites avec l’augmentation de la durée de vie et les prestations maladies qui en découlent, et l’entrée tardive des jeunes sur le marché, entraîne nécessairement un départ plus tardif de l’âge de la retraite. A notre société de rendre le travail attractif et solidaire par les métiers liés à l’environnement, aux énergies renouvelables et à l’informatisation.
Une diminution de la masse salariale de la fonction publique : si la part des salaires de la fonction publique était égale à la moyenne de la part des salaires publics constatée dans les pays de l’OCDE, on économiserait l’équivalent de 3 points de PIB, soit plus de la moitié de l’effort à consentir.
Une vente des actifs publics qui plombent la gestion de nos deniers publics, à cause des frais d’entretien ou de recapitalisation permanente des entreprises boiteuses aux frais des contribuables. Cette justification d’un important secteur public n’a plus guère de sens, au moment où notre dette explose. Il faut vendre ces actifs pourvu que l’on se donne le temps de ne pas les brader.
A l’heure ou nos concitoyens doutent des capacités politiques de nos dirigeants, et ce qui est plus grave encore de la politique en général, l’UDI Martinique appelle à la raison et à la confiance afin de ne pas tomber dans les extrêmes qui conduisent à l’anarchie ou à la dictature !
Une politique nationale courageuse par une refonte moderne du système fiscal, un droit du travail plus souple, une école consciente des enjeux du 21ème siècle, une croissance induite par l’entreprise et les énergies renouvelables, doit permettre le redressement de la France avant qu’il ne soit trop tard…
C’est cette politique que l’UDI propose et proposera dans les échéances à venir, qui peuvent arriver plus vite que prévu…, et pour lesquelles elle est prête à prendre ses responsabilités !
Philippe PETIT
Président de l’UDI Martinique