— Par Yves-Léopold Monthieux —
Ainsi donc, après plusieurs reports, l’affaire dite du Green Parrot qui met en cause l’ancien président de la Région Martinique semble s’acheminer vers une décision définitive. Qu’on laisse tranquille Alfred Marie-Jeanne, c’est le souhait de la plupart des Martiniquais qui sont généralement convaincus que l’ancien président de l’ex-Région n’a jamais cherché à s’enrichir dans ses fonctions, en particulier à l’occasion de cette affaire où il a pu se laisser abuser. Que ses partisans fassent pression pour qu’il ne soit pas condamné, c’est de bonne guerre. Mais de là à parler de justice politique … Ce n’est pas d’aujourd’hui que date le choix des défenseurs des personnes poursuivies dans cette affaire, de jouer l’opinion publique. Cette méthode n’est pas étrangère aux reports successifs. C’est d’ailleurs pour échapper à cette pression que le dépaysement de l’affaire en métropole a été décidé par la Cour de cassation.
Il se pourrait que le Président se soit piégé lui-même en raison de la bienveillance qui lui avait été accordée par l’État dans une affaire similaire qui avait concerné La Grenade. Dans l’exercice du contrôle de la légalité des actes administratifs, l’État s’était finalement désisté de la requête qu’il avait intentée auprès du Tribunal administratif pour faire annuler la précédente décision, entachée d’irrégularité. Le président de la collectivité n’avait peut-être pas saisi le caractère exceptionnel de cette décision qui l’avait opposé à l’État, et à l’État seul. Il crut pouvoir renouveler l’opération, persuadé peut-être de pouvoir bénéficier d’une forme de jurisprudence, sauf que dans la nouvelle affaire l’État n’était plus le seul intéressé à l’affaire.
En temps ordinaire, dans une atmosphère de coopération régionale, comme pour l’affaire de La Grenade, il ne viendrait à personne l’idée de dénoncer une aide financière accordée à titre de solidarité à un pays voisin, fusse-t-elle illégale. C’est une tentation qu’a eu tous les partis politiques depuis 40 ans. Mais pour la Dominique, les choses se son gâtées, vraisemblablement en raison des circonstances politiques. On était en période électorale et une troisième partie ayant un intérêt à agir s’y était invité, par le biais d’une lettre anonyme largement diffusée. Ce courrier visait plus particulièrement des présomptions d’infractions pénales liées à l’octroi de cette aide.
Si au fil du temps des rumeurs ont couru mettant en cause des élus martiniquais, elles ont rarement abouti devant le tribunal et fait l’objet de condamnations judiciaires. Depuis les années 1960 aucun élu parlementaire ou président de collectivité n’a eu à affronter la justice pénale pour des faits commis dans l’exercice de ses fonctions. A cet égard, une condamnation d’Alfred Marie-Jeanne au bout d’une telle saga judiciaire marquerait l’histoire politique de la Martinique. Curieusement, elle aurait concerné l’homme politique martiniquais le plus populaire des 50 dernières années et unanimement reconnu pour sa probité.
Quoi qu’il en soit, ces poursuites judiciaires peuvent être regardées comme un message adressé à ceux qui doutent de la suite de dossiers judiciaires pouvant mettre en cause des élus ou autres personnalités.
Fort-de-France, le 28 avril 2025
Yves-Léopold Monthieux