— Communiqué de Culture Égalité —
Bientôt, les féministes célèbreront l’anniversaire d’un événement très important pour les femmes. En effet, il y a 50 ans était promulguée en France la loi relative à l’interruption volontaire de grossesse. Défendue par Simone Weil, alors ministre de la Santé, au cours de son discours historique à l’Assemblée Nationale, cette loi du 17 janvier 1975 dépénalise l’avortement dans le pays.
Quelques étapes de cette conquête : En 1967, une loi autorise la contraception en France. À la suite, de nombreuses personnalités interviennent publiquement en faveur d’une législation favorable à l’IVG.
En 1971, 343 femmes courageuses déclarent avoir avorté et prônent, dans une pétition, la légalisation de l’IVG, en raison notamment des risques médicaux que comportent les interventions clandestines.
C’est en 1972, dans le procès historique de Bobigny, que Gisèle Halimi arrache la relaxe de M-C. Chevalier, jeune femme de 16 ans ayant avorté à la suite d’un viol, ainsi que des 4 femmes qui l’avaient aidée.
Par la suite, en 1973, 331 médecins revendiquent publiquement, dans une tribune, la pratique d’avortements clandestins illégaux. Les femmes se mobilisent dans la rue.
La loi Weil, avancée majeure, en France, en faveur des droits reproductifs, contrecarre l’hypocrisie sociétale qui existait jusqu’alors. Ce changement considérable n’aurait pu survenir sans le militantisme des féministes de l’époque, œuvrant dans l’illégalité pour permettre à chaque femme d’échapper à la malédiction des grossesses non désirées et de disposer de son corps selon son souhait (avortements clandestins dans de bonnes conditions d’hygiène, organisation revendiquée de voyages en Angleterre, pays où l’IVG est autorisée…)
Depuis, sous la pression des luttes féministes, la législation n’a cessé de renforcer le droit et l’accès à l’avortement pour les femmes : multiplicité des méthodes et des acteurs.trices au fur et à mesure du temps, disparition de la condition de détresse en 2014, prise en charge totale de l’acte par la Sécurité Sociale depuis 2016, allongement du délai jusqu’à 16 semaines de grossesse en 2021.
En 2024, la France devient le premier pays dans le monde à inscrire ce droit dans son texte fondamental : en effet, l’article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».
Toutefois, cette constitutionnalisation récente du droit à l’avortement apparaît en parallèle d’une montée du fascisme à travers le monde dont les femmes sont les premières victimes : utilisation du viol comme arme de guerre au cours des conflits en Ukraine, en Haïti ou en Syrie ; exclusion progressive des femmes de la vie publique par les talibans afghans revenus au pouvoir en 2021 (ils leur interdisent désormais de faire entendre le son de leur voix) ; abrogation de la loi dépénalisant l’avortement aux Etats-
Unis en 2022 et nouvelle élection de D. Trump à la présidence en 2024. En France et en Kanaky, 4 féminicides ont déjà eu lieu depuis le 1er janvier 2025.
En réalité, l’accès à l’IVG reste fragile : n’oublions pas qu’une politique de désinformation générale quant à la santé affective, sexuelle et reproductive est menée par les mouvements internationaux d’extrême droite.
Par ailleurs, chez nous en Martinique, le taux de recours à l’IVG était de 29,7 pour 1000 femmes en 2021. Ce taux, élevé par rapport à la moyenne nationale (14,4 IVG pour 1000 femmes), est à corréler aux fortes inégalités socio-économiques du territoire : répartition très inégale de l’offre de soins sur l’île, insuffisance des transports en commun permettant d’accéder aux centres de soins, obstacles aux interventions scolaires sur la vie affective, sexuelle et reproductive dressés (entre autres) par les établissements eux-mêmes, méconnaissance des jeunes à propos de la contraception et des modalités de prévention des infections sexuellement transmissibles. Enfin, les premières victimes de la vie chère en Martinique restent les femmes.
Le 17 janvier est, certes, la date anniversaire de la dépénalisation de l’IVG en France, mais la défense, la consolidation, l’élargissement et la concrétisation de ce droit reproductif s’inscrivent dans les combats quotidiens des associations féministes, telles Culture Egalité, pour les droits de femmes et contre les inégalités.
Eva pour CE.
mercredi 15 janvier 2025