Niels Arestrup, une figure marquante du cinéma et du théâtre français, est décédé le 1er décembre 2024 à l’âge de 75 ans, après une longue maladie. Né à Montreuil-sous-Bois le 8 février 1949, l’acteur, réalisateur et metteur en scène s’est imposé par sa présence intense et sa capacité à incarner des personnages souvent ambigus, tourmentés, voire violents. Son parcours a été aussi remarquable qu’atypique, avec des rôles complexes, marqués par un côté sombre qui ne laissait personne indifférent.
Issu d’un milieu modeste, Niels Arestrup a grandi dans un contexte familial particulier, avec un père danois et une mère bretonne. Après avoir raté son baccalauréat en 1968, il enchaîne les petits boulots avant de se lancer dans le théâtre, un domaine où il se distingue très vite par son jeu brut, sans concession. Il devient un acteur recherché, d’abord pour ses rôles secondaires dans des films d’auteur, mais c’est dans les années 2000 qu’il connaît une reconnaissance publique, notamment grâce à ses performances dans des films comme De battre mon cœur s’est arrêté (2005), Un prophète (2009), et Quai d’Orsay (2013), pour lesquels il remporte à plusieurs reprises le César du meilleur acteur dans un second rôle.
Cependant, sa carrière n’a pas été sans controverse. L’acteur était régulièrement associé à une réputation de partenaire difficile et parfois violent. Des incidents notables ont terni son image, notamment sur les plateaux de théâtre, où plusieurs actrices l’ont accusé de violences physiques. Isabelle Adjani a évoqué une gifle reçue sur le tournage de Mademoiselle Julie en 1983, un incident qui a poussé la comédienne à abandonner la pièce. En 1996, il avait aussi une altercation violente avec Myriam Boyer lors d’une représentation de Qui a peur de Virginia Woolf ?. Licenciée par Niels Arestrup, qui produisait la pièce, l’actrice, qui l’accuse de l’avoir presque étranglée, a par la suite obtenu 800.000 francs de dommages et intérêts.
Malgré ces accusations, Niels Arestrup a toujours nié avoir exercé une violence délibérée, se défendant en affirmant que ces incidents étaient souvent le fruit de malentendus ou de tensions exacerbées. Il a également déclaré avoir toujours détesté la brutalité et a exprimé son malaise face à la manière dont cette réputation de violence l’avait suivi tout au long de sa carrière.
Au-delà de ces aspects controversés, Niels Arestrup était un homme complexe, à la fois solitaire et généreux, capable de moments de grande douceur et de réflexion, mais aussi d’une intensité animale dans ses interprétations. Son partenaire de longue date, le réalisateur Éric Lartigau, a décrit un homme rempli de doutes, mais aussi d’une sensibilité rare, qui se protégeait derrière une carapace de dureté. Ce mélange de fragilité et de force a fait de lui un acteur unique, souvent perçu comme un personnage caractériel, mais aussi profondément humain.
Niels Arestrup laisse une trace dans le monde du théâtre et du cinéma français. Sa carrière, marquée par la diversité de ses rôles et la profondeur de son jeu, restera dans les mémoires, même si son nom restera aussi associé aux controverses qui ont jalonné sa vie professionnelle. Dans la mémoire collective, il demeurera un homme complexe, dont la violence intérieure contribuait à l’intensité de ses prestations artistiques.
Hélène Lemoine