— Par Julien(*) —
Parfois isolées, parfois proches des côtes, elles peuvent être de tailles et de formes variées.
Loin des hommes, elles sont souvent un sanctuaire d’oiseaux et d’espèces rares.
Parfois, ce sont aussi des sanctuaires de touristes.
Ils s’y amassent l’été. On les y transporte par nefs immenses et improbables ou par pont aérien. Les oiseaux de fer, que les humains appellent “avions” sont à l’œuvre.
Les avez-vous reconnues ?
Ce sont les îles.
Elles sont précieuses et fragiles.
Des écosystèmes uniques
Une grande étude publiée le 10 octobre 2024 dans la plus prestigieuse des revues scientifique, Nature remet les îles sous le feu des projecteurs.[1]
Cette équipe de 12 chercheurs, venus des quatre coins de la planète, a analysé 304 103 espèces de plantes.
Selon eux, 94 052 (31 %) des espèces répertoriées dans l’étude poussent sur les îles.[2]
Et 63 280 espèces de plantes sont considérées comme endémiques soit 21 % du total des plantes répertoriées dans l’étude.
Les chercheurs distinguent les plantes natives qui sont nées sur l’île, mais que l’on retrouve ailleurs, des plantes endémiques.
Ces dernières sont non seulement nées sur l’île, mais ne se trouvent pas ailleurs.
En effet, les îles, par leur isolement, sont des lieux où se créent des écosystèmes spécifiques.
Les espèces endémiques suivent une destinée qui leur est propre au sein de la grande évolution des plantes et animaux de la terre.
Ils expliquent également que leur étude porte sur les plantes vasculaires, c’est-à-dire toutes celles qui ont un système de circulation interne pour transporter l’eau et les nutriments vers la tige et le reste de la plante.[3]
Ce sont les plantes auxquelles vous pensez naturellement les arbres, arbustes, les herbes de toutes sortes et les fleurs.
En revanche certaines plantes au mécanisme de vie différent comme les mousses et lichens sont exclues de l’étude.
Des trésors naturels en danger
Cette richesse naturelle des îles est d’autant plus remarquable que les îles ne représentent qu’une petite partie de la masse terrestre : 5,3 % d’après l’étude. (6 % d’après d’autres sources).[4]
D’après le chercheur en chef de cette étude, l’allemand Julian Schrader, de la faculté de sciences naturelles de l’Université de Macquarie à Sydney, cette étude offre le tableau le plus complet jamais réalisé de la biodiversité dans le monde.
Il estime que grâce à ce travail, il sera plus facile pour les chercheurs de savoir où et pour quels végétaux, il faut augmenter les efforts de protection.
L’étude, par ailleurs, rappelle que les Nations Unies ont fixé un objectif de protection de 30 % des zones terrestres et maritimes des îles qui disposent d’espèces endémiques.
Mais aujourd’hui, 6 % seulement de ces zones sont protégés.
Qui est sur le podium ?
Les chercheurs ont identifié plusieurs hauts-lieux de la biodiversité et de l’endémisme végétal.
Les grandes îles tropicales ou équatoriales en font partie.
L’île qui figure en haut de la liste est Madagascar avec 9 318 espèces endémiques, suivie de près par la Nouvelle-Guinée et ses 8 793 espèces endémiques.
Bornéo en Indonésie en compte 5 765, Cuba 2 679 et la Nouvelle-Calédonie 2 493.
Les scientifiques de l’étude s’enthousiasment par ailleurs pour certaines espèces extrêmement rares que l’on peut trouver sur les îles dont l’histoire géologique est mouvementée et particulière.
C’est le cas par exemple de Hawaï ou de la Polynésie française.
Quels sont les pays qui comptent le plus d’îles au monde ?
Les îles, notamment tropicales, représentent donc une très grande responsabilité pour les pays qui en ont la charge.
L’Indonésie, qui compte plus de 17 000 îles dont 6 000 sont habitées, est l’un des premiers pays concernés par la biodiversité insulaire.[5]
Les Philippines en recensent plus de 7000. L’essentiel du territoire philippin est concentré sur 11 d’entre elles. Il en resterait 2 500 à nommer ![6]
Ce sont des îlots plutôt que des îles qui ne comptent aucun habitants humains.
La France Outre Mer est aussi en première ligne !
La Nouvelle-Calédonie, en particulier, est considérée par les scientifiques comme un écrin de biodiversité.
Son taux d’endémisme serait de 76 %. [7]
Seules la Nouvelle-Zélande (82 %) et Hawaii (89 %) font mieux dans le monde !
L’archipel de Nouvelle-Calédonie est en particulier réputé pour ses plantes à fleurs et ses oiseaux dont le fameux Cagou, qui ne vole pas et étend ses ailes pour impressionner ses adversaires.
Il existe même un écosystème propre aux mines de Nickel présentes sur le territoire !
De même, l’île de la Réunion, toute proche de Madagascar, est connue pour la beauté de sa nature et ses espèces endémiques.
L’île possède environ 230 espèces végétales endémiques. Comme la Nouvelle-Calédonie ou Madagascar, elle fait partie de la liste des 34 “hots spots” ou points chauds du globe en matière de biodiversité.[8]
Ces points chauds sont des zones où la biodiversité est riche et en bon état, mais menacée notamment par le réchauffement climatique.
Deux grands espaces naturels sont protégés à la Réunion :
le parc naturel de l’île qui représente 40 % de sa surface,
la réserve naturelle de l’étang de Saint Paul qui est une zone humide protégée depuis 2008 en conformité avec la convention de Ramsar.
la réserve naturelle nationale marine créée en 2007 qui protège 40 % de la côte.
Et ce n’est pas tout.
Il faut évidemment citer la Martinique dont 46 % du territoire est couvert par la forêt tropicale et dont la biodiversité exceptionnelle a été reconnue par l’Unesco.[9]
La Guadeloupe voisine n’est pas en reste avec un des taux de diversité biologique parmi les plus élevés du monde. Son parc naturel est considéré comme un joyau fragile.[10] Un programme coordonné pour l’ensemble des territoires d’outre mer
Un grand programme d’étude a été lancé pour mieux connaître, comprendre et protéger ces territoires uniques.
Il s’agit du Compteur de la biodiversité d’outre-mer qui crée du lien entre 145 programmes de sciences participatives sur l’ensemble des territoires d’outre-mer. [11]
Sont par exemple concernés les territoires des Antilles, de la Polynésie française, de St Pierre et Miquelon, Mayotte, Wallis et Futuna, Saint Barthélemy, la Nouvelle-Calédonie et la Réunion.
Ces programmes sont menés majoritairement par des associations et ont vocation à faire participer les citoyens qui le souhaitent qu’ils s’agissent d’amoureux de la nature ou de naturalistes.
Les écoles sont souvent associées à ces programmes.
Quelles sont les grandes menaces pour ces îles ?
Quelques grands risques menacent directement la biodiversité de ces espèces entre terre et mer.
Ce sont notamment :
le plastique des océans ;
la pollution des villes ;
l’activité agricole intensive (l’usage massif des pesticides notamment) ;
le réchauffement climatique.
Dans tous ces domaines, des actions ont été lancées.
Heureusement, car il s’agit d’une course contre la montre.
Arriverons-nous à sauver la majorité des espèces endémiques des îles ?
Solidairement,
(*)Julien
Source : https://www.leslignesbougent.org/