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Par Isabelle Autissier, présidente du WWF France, Maria Cecília Wey de Brito, directrice générale du WWF Brésil, Claudio Maretti, responsable de l’initiative WWF «Pour une Amazonie Vivante», Dominiek Plouvier, directeur du bureau régional WWF «Plateau des Guyanes»
A la frontière commune des deux Etats, la quête du métal précieux s’est transformée en un pillage anarchique des ressources.
Aujourd’hui, la Présidente du Brésil Dilma Rousseff débute une visite d’État de 48h sur le sol français. Une formidable opportunité de rappeler que le Brésil et la France partagent une même frontière sur tout le pourtour sud et est de la Guyane française. Ainsi, sur plus de 600 km, seuls un fleuve ou une ligne de crête séparent les deux Pays, dans un prodigieux décor amazonien. Là, l’impulsion du Brésil a permis la création du Parc national des Tumucumaque en 2002 dans l’Etat de l’Amapa, suivi en France par la naissance du Parc amazonien de Guyane en 2007. Ensemble, ces deux aires protégées contigües forment le plus grand massif tropical protégé au monde.
Mais c’est pourtant dans ce contexte apparemment idyllique que se dégrade la relation entre les deux pays. Au cœur de ces gigantesques zones protégées vouées à la biodiversité et aux communautés locales, un mal profond s’est installé : la fièvre de l’or. Essentiellement alimentée par un très fort marché de la demande en or et confortée par des enjeux socioéconomiques que partagent les deux pays, cette quête de richesses, attisée par le cours vertigineux du métal précieux, s’est transformée en un pillage anarchique de ressources théoriquement placées sous la protection des Etats. Contamination de l’eau au mercure, destruction des forêts primaires, dégradation des conditions de vies et insécurité sont devenues le quotidien des communautés locales et indigènes. Conscients de cette situation, les deux gouvernements avaient pourtant décidé de s’engager, par un accord bilatéral spécifique, à lutter conjointement contre ce fléau, qui pollue les rivières françaises de Guyane et écorne profondément l’image du Brésil en France.
Signé en 2008, ce texte, qui vise spécifiquement à rétablir la crédibilité des aires protégées brésiliennes et françaises en leur permettant de bénéficier de moyens destinés à faire respecter la loi, n’est toujours pas ratifié par le Brésil. Pire, depuis le lâche assassinat de deux militaires français par des garimpeiros en juin 2012, cette apparente passivité d’une minorité d’élus brésiliens jette le doute sur l’existence d’une réelle volonté bilatérale d’endiguer un tel scandale socio-environnemental. Les protestations publiques organisées à Cayenne, les tensions sociales créées de part et d’autre, doivent maintenant amener les Présidents du Brésil et de la France à accélérer le processus de ratification côté Brésil et à mettre en place des actions bilatérales annoncées depuis bientôt quatre années. Quatre années qui ont vu se perpétrer trop de crimes, trop de délits, qui pèsent maintenant fortement sur la coopération franco-brésilienne.
Dans le cadre de cette visite d’État, Brésil et France ont ici une opportunité unique à saisir de faire stopper l’exploitation aurifère illégale dans les zones protégées, comme demandé par le WWF et la Coica (Coordination des organisations indigènes du bassin amazonien) dans «l’Appel pour l’Amazonie» lancé au sommet de la terre Rio+20.
11 décembre 2012 à 07:45