—Par Hélène Jarry —
À la tête des plus grands orchestres mondiaux, ce chef à la grande culture humaniste nous laisse une œuvre discographique lumineuse. Un homme dont les silences dégageaient autant de force que sa musique.
Ce lundi 20 janvier est mort l’un de ces chefs d’orchestre qui font l’histoire de la musique: Claudio Abbado. Il a atteint ce statut sans le revendiquer et sans enfourcher de chevaux de bataille. À la fois rationnel et dionysiaque, doué d’une vaste culture humaniste, il a su écouter le son profond des grandes formations qu’il a dirigées ; il a donné à travers elles les interprétations lumineuses, fougueuses ou hantées d’un répertoire qui ne se circonscrit pas facilement. Le maestro italien, rompu au répertoire lyrique de son pays, a pénétré avec une égale profondeur l’esprit germanique comme Claude Debussy.
Assistant de Leonard Bernstein
Claudio Abbado était très réservé, mais ses proches ressentaient autant de force dans ses silences que dans sa musique. Très éloigné des mondanités, il donne à lire son parcours à travers ses études, les postes qu’il a occupés, les phalanges qu’il a fondées, et une énorme discographie.
Né à Milan en 1933, il a étudié au conservatoire de la ville. Il s’est perfectionné à Vienne avec Hans Swarowsky. À vingt-cinq ans, il fait ses débuts de chef en dirigeant l’Amour des trois oranges de Prokofiev. Il devient l’assistant de Leonard Bernstein au Philharmonique de New York, puis chef permanent et enfin directeur musical de l’orchestre de la Scala de Milan. Londres, Vienne, Berlin, il se retrouve à la tête des plus grands orchestres, avec lesquels il élaborera son œuvre discographique, faisant appel aux prestigieux solistes qui sont ses amis, Martha Argerich ou Maurizio Pollini, avec lequel il organise des concerts dans des lieux populaires.
Vivifié le potentiel
La formation des jeunes musiciens d’orchestre et d’ensembles plus restreints est un autre volet de l’activité de Claudio Abbado. Il participe à la création de l’Orchestre de chambre d’Europe en 1981, à l’Orchestre des jeunes Gustav-Mahler en 1986. En 1997, il fonde le Mahler Chamber Orchestra. Enfin en 2003, alors qu’il lutte depuis plusieurs années déjà contre la maladie, c’est la naissance de l’Orchestre du festival de Lucerne. Abbado est pleuré par les siens, par ceux qui l’ont écouté, par ceux qu’il a aidés, à Bologne, à Ferrare, à Parme, dans toutes ces villes d’Italie dont il a vivifié le potentiel, et aussi sur cet espace de côte de Sardaigne où il trouvait refuge et qu’il a contribué à rendre à la nature.
France Musique modifie ses programmes pour rendre hommage à Claudio Abbado. Vendredi, le Casque et l’Enclume (12 h 30) reviendra sur la carrière du chef. Dimanche 26 janvier, à 14 heures, Stéphane Grant lui rendra hommage dans Lirico Spinto.
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Hélène Jarry
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