Ce week-end, le naufrage d’une embarcation de migrants a causé un nombre de morts jamais égalé au large de Lampedusa. Les autorités européennes accusent les passeurs de ce nouveau drame. ONG et responsables politiques de gauche critiquent, eux, l’Europe forteresse.
Dans la nuit de samedi à dimanche, 700 migrants ont perdu la vie en mer au large des côtes italiennes. « La pire hécatombe jamais vue en Méditerranée », a déclaré Carlotta Sami, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), en rendant publique la sinistre nouvelle.
Cette semaine, selon les gardes-côtes italiens, plus de 11 000 personnes auraient fait l’objet d’opérations de sauvetage au large de Lampedusa. Depuis le début de l’année, plus de 1 600 personnes auront, malgré tout, péri noyées aux portes de l’Europe, dont 1 150 ces derniers jours. Ce décompte macabre s’élevait à 50 âmes, l’année dernière à la même époque, alors que l’opération italienne « Mare Nostrum » était encore en place. Pourtant, au mois d’octobre dernier, le ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, après avoir rencontré ses homologues de l’Union européenne, s’était glorifié d’avoir « obtenu que l’on mette fin à l’opération “Mare Nostrum” pour lui substituer une opération de contrôle des frontières extérieures », faisant référence à l’opération « Triton » diligentée par Frontex. Mais nos gouvernants refusent de voir un lien de cause à effet entre la fermeture des frontières et ces tragédies. Hier midi, François Hollande accusait les passeurs d’être responsables des noyades, allant même jusqu’à les qualifier de « terroristes ».
« La France responsable de la déstabilisation de la Libye »
« On joue sur les fantasmes, s’indigne Marie-Christine Vergiat, députée européenne du Front de gauche. Les responsables de ses drames humains sont les États membres de l’Union européenne (UE), pas les passeurs. Les États bloquent toute évolution des politiques migratoires, malgré les recommandations des ONG, du Parlement et de la Commission européenne. » L’europarlementaire fustige, de plus, la politique d’externalisation des contrôles migratoires traduite dans le processus de Khartoum. Une opération de police à distance à laquelle participent, en plus des 28 États membres de l’UE, la Libye, l’Égypte, le Soudan, le Sud-Soudan, l’Éthiopie, l’Érythrée, Djibouti, la Somalie, le Kenya, la Tunisie… Des pays qui n’offrent aucune garantie en ce qui concerne les droits de l’homme ou même, comme en Érythrée ou au Soudan, dont les dirigeants sont des dictateurs aux mains ensanglantées. « C’est ceux-là mêmes que les migrants fuient, poursuit l’élue. Par ailleurs, la France est complètement responsable de la déstabilisation de la Libye et voudrait que ce soit elle qui limite les départs depuis ses côtes. C’est d’une hypocrisie incroyable. »
Selon le HCR le monde fait face, aujourd’hui, à la pire crise humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale…