— Par Marie-José Sirach —
Conférence de presse bilan sous les micocouliers. En présence de la ministre de la Culture Audrey Azoulay. Olivier Py avait les cernes des grands jours mais affichait un bilan globalement très positif.
Le rituel des chiffres auquel nous n’échapperons pas : 167 000 entrées (120 000 payantes, 47 000 gratuites), un taux de fréquentation de 95 %. Deux succès dans la cour d’Honneur (les Damnés et Babel). Bref, Olivier Py est un directeur heureux, parle d’« un moment de grâce », rend un hommage appuyé et mérité aux Cemea (mouvement national d’éducation populaire) dont l’action auprès des jeunes en fait depuis la création du festival une des plus belles écoles du spectateur… On ne retiendra rien de la ministre de la Culture, venue en représentation. Elle aurait pu annoncer une rallonge budgétaire pour la prochaine édition. Elle s’est contentée de dire que tout était formidable. Quant à Olivier Py, il a rendu hommage au public, à sa ferveur, à sa passion, à son engagement militant pour le théâtre et le festival. Aux équipes et aux artistes « tous soucieux de parler du monde, forts d’une conscience politique aiguë qui jamais ne cède au désespoir ». Le festival, après l’attentat sanglant de Nice, ne s’est pas arrêté. « Je savais que le public d’Avignon était un public engagé, militant. Il est devenu un public résistant », a-t-il ajouté, précisant qu’« Avignon n’est pas un festival de divertissement, on ne vient pas y faire du tourisme culturel mais remonter l’horloge de la conscience ».
Depuis la Grèce antique, le théâtre raconte la tragédie
« Être ensemble aujourd’hui est notre force. C’est un geste de résistance », avait affirmé la direction du festival dans un communiqué au lendemain de l’attentat meurtrier de Nice. Cela peut paraître dérisoire. Et cela l’est. Sûrement. Mais la mort nous regarde et tout semble dérisoire. À commencer par un état d’urgence dont on a mesuré jeudi 14 juillet « l’efficacité ». Sur un plateau de théâtre, les personnages meurent, puis ils se relèvent et viennent saluer. Depuis la Grèce antique, le théâtre raconte la tragédie, l’étrange comédie humaine, tente de démêler la complexité du monde, la fragilité des hommes, la tentation du mal, la douleur et la joie, la vie et la mort. Jusqu’à il y a peu, le chaos du monde nous parvenait par bribes, atténué par la distance. Bagdad, Alep, Istanbul, Bamako, Alger… et puis il y eut Paris, et Bruxelles, Orlando, Nice, Munich, Kaboul. Massacre sur massacre…