— Par Caroline Constant —
Chloé Verlhac, la femme du dessinateur Tignous, assassiné le 7janvier dernier à « Charlie Hebdo », est à l’origine du premier tome d’une anthologie de ses œuvres [sortit], le 14 octobre.
Tignous. Éditions du Chêne, 38 euros. Il s’interrogeait sur notre responsabilité dans le départ pour le djihad des adolescents, quand les frères Kouachi sont entrés à Charlie Hebdo, le 7 janvier dernier. Tignous, comme onze autres personnes, est tombé sous leurs balles. Demain, 14 octobre, sort en librairie le premier tome d’une anthologie de ses œuvres. C’est son épouse et complice, Chloé Verlhac, qui a voulu montrer au public l’œuvre de son grand escogriffe de mari. Ce petit bout de femme, toute en rousseur, a la détermination des braves et l’énergie du désespoir. Pour elle, pas question que la barbarie triomphe, dans cette histoire. De son si prolixe époux, elle a sélectionné dans ce fabuleux ouvrage 200 illustrations, qui témoignent de la richesse de l’imagination de Tignous, de la variété de ses centres d’intérêt et de ses révoltes, et de son rêve de fraternité. Et aussi et surtout de la bonhomie du personnage, au trait puissant et incisif, mais jamais méchant.
« Ils ont tué mon mari, mon amoureux, le père de mes enfants. Mais ils n’ont pas pu faire taire l’artiste », explique Chloé, une peine immense au fond des yeux. Sortir cette anthologie, pour elle, c’est montrer qu’un « artiste travaille pour être vu, pour donner à voir, pour laisser une trace. Comme un petit sentiment d’éternité ». Elle a tout de suite voulu « refaire exister Tignous tout de suite », à travers ses œuvres. C’est en travaillant, avec le dessinateur Pascal Gros, sur le projet de reparution de Comment rater ses vacances qu’est née l’idée de l’anthologie, au printemps dernier. Mais Tignous dessinait tout le temps, sur tous les supports : ses dessins de presse, pour Charlie Hebdo et Marianne, bien sûr ; mais aussi ses reportages, sur des carnets dédiés. Des dessins sur la vie quotidienne, griffonnés dans un autre carnet qui traînait dans sa poche. « Il dessinait même sur des galets », s’amuse Chloé. « Quand nous partions en vacances, à la plage, il prenait le seau des enfants, qui protestaient, pour aller à la chasse aux galets, qu’il sélectionnait et lavait avec soin avant de dessiner dessus. » Le problème du choix des dessins s’est donc posé. Pas longtemps : « Dans son bureau, raconte l’émouvante Chloé, un sourire au coin des lèvres, tout était organisé. Il avait classé ses dessins par piles de thèmes. Nous n’avons eu qu’à piocher pour trouver, d’autant que les dessins de Tignous sont tous excellents. »
Des dessins uniques,
en couleurs et en noir et blanc…