— ContreChroniques d’Yves-Léopold Monthieux —
Ainsi que le regrette un observateur dans un récent article, en ces temps de bouleversement de l’ordre social d’ici et d’ailleurs, l’élite martiniquaise se tait. Au pays de Césaire, de Fanon et de Glissant, les intellectuels sont à ce point silencieux qu’on pourrait se demander si la Martinique pense encore. Mais, finalement, que voulez-vous qu’ils fassent, en face de l’échec du pays qui est aussi le leur ?
Réputé avoir perdu leur identité, les Martiniquais se sont vu appliquer depuis près d’un demi-siècle une révolution culturelle en mode de désaliénation – re-aliénation. Issue des mouvements des années soixante et inspirée par les figures totémiques du socialisme, la jeunesse sachant représentait toutes les nuances de la galaxie communiste. Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en France, cette opération a connu un succès électoral inédit : près d’un demi-siècle de pouvoir local absolu des autonomistes et indépendantistes, ainsi qu’une probabilité de continuité peu contestable. Mais en fait de révolution, tout ce monde s’est installé avec gourmandise dans l’assimilation, les politiques étant aux manettes et les intellectuels, à la culture identitaire et victimaire.