REVUE DE PRESSE. De Ouagadougou à Arusha : il n’est pas si simple pour les contemporains de mettre en application le projet politique du père de la révolution burkinabè.
À quoi sert un mémorial ? À se souvenir, à approfondir un pan d’histoire, à réparer l’injustice ? Le projet de mémorial dédié à Thomas Sankara semble accomplir chacune de ces fonctions. Lancé à Ouagadougou le 2 octobre 2016, il convoque d’abord l’histoire. C’est en effet le 2 octobre 1983, soit 33 ans plus tôt, que le père de la révolution burkinabè réunit dans la nuit des journalistes au Conseil de l’entente, sa base politique. Dans ce lieu où il sera assassiné quatre ans plus tard, il prononce son « discours d’orientation politique ». Se diffuse ainsi le socle idéologique de cette révolution qui entend abolir un système taxé de « néocolonialiste » et d’« impérialiste ». Il fustige notamment le faible taux de scolarisation (16,4 %) dans ce qui s’appelle encore la Haute-Volta, le coût faramineux des fonctionnaires (70 % des dépenses publiques), ou la mauvaise utilisation des investissements étrangers. Il instaure les Comités de défense de la révolution (CDR), censés transférer le pouvoir à des échelons locaux, et présente un programme de transformation de la société articulé sur trois axes : l’armée nationale, la politique de la femme et l’édification économique.
Burkina Faso: Inauguration du mémorial dédié au Capitaine Thomas Sankara https://t.co/oc6vjPPF0a pic.twitter.com/D4nBAfWrHs
— koaci.com (@Koaci) 3 octobre 2016
C’est donc dans ce lieu symbolique que sera érigé le mémorial Thomas Sankara. L’inauguration du projet, dimanche 2 octobre, a rassemblé plus de 3 000 personnes autour d’un symposium, d’une marche dans les rues de la capitale burkinabè, et d’une soirée musicale. De nombreux jeunes de la sous-région ont afflué au Palais du Peuple. Étaient également présents des responsables politiques et associatifs, ou des artistes tels que l’Ivoirien Tiken Jah Fakoly, le Sénégalais Didier Awadi ou la Malienne Nahawa Doumbia. « Thomas est parti, mais nous sommes là », résume simplement cette dernière sur le site d’info Burkina24.
#Burkina la maison du peuple surexcitée. Ambiance révolutionnaire des années 80 sous Thomas Sankara avec les Slogans forts. #lwili
— Ocomar (@ocomar) 2 octobre 2016
Avec les deux ainés Alpha et Tiken
route du retour de Ouagadougou apres avoir eu l’honneur de participer au lancement du Memorial de Sankara pic.twitter.com/NvzuhBnqia
— Fadel Barro (@BarroFadel) 6 octobre 2016
L’idéal Sankara
Que représente Sankara aux yeux de ses contemporains et admirateurs réunis à Ouagadougou ? Cité par le titre burkinabè Sidwaya, l’ancien président ghanéen John Jerry Rawlings – parrain de l’événement – associe à son ancien ami « la force de la conviction » et le voit comme « le modèle suprême de l’intégrité ». L’animateur de radio et chanteur Sams’K Le Jah abonde quant à lui sur son volontarisme dans Burkina 24. « En quelques mois, Thomas Sankara a mis le peuple en marche. Il y en a qui passent 25 ans au pouvoir et quand ils s’en vont, on ne sait même pas ce qu’ils ont fait », lâche-t-il. Ce militant a 14 ans lorsqu’il intègre le mouvement de jeunesse les Pionniers de la révolution. Comme nombre de ses concitoyens, il se met au travail. Parallèlement à une instruction militaire, il participe à certains chantiers de la révolution, tels que les opérations de nettoyage mais aussi la protection de l’environnement. « On devait planter des arbres, encourager les uns et les autres à prendre soin de la petite forêt en luttant contre les feux de brousse et la divagation des animaux », raconte-t-il. « La révolution nous a appris la discipline, l’amour de la patrie et du travail, et le sens de l’intérêt général », ajoute celui qui a dédié plus d’une chanson à Thomas Sankara.
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