José Alpha le metteur en scène dela pièce ci-dessus nommée nous commuique des réactions de spectatrices et spectateurs et si elles sont assez différentes des appréciations de R. Sabra nous les publions volontiers. M’A
Laisse tomber la neige de Pierrette Dupoyet avec Elisabeth Lameynardie dans une adaptation et mise en scène de José Alpha
Reprise à la demande du public programmée au Festival du Théâtre amateur de la Ville de Fort de France, le mardi 12 et mercredi 13 mai 2015 à 19h30 au Théâtre Aimé Césaire.
Depuis sa création en 1983, la Cie Téatlari – Théâtre des cultures créoles fait généralement circuler son Cahier de route lors des représentations données sur les places publiques et dans tous les lieux de vie populaire; les spectateurs y inscrivent leurs ressentis, impressions et suggestions qui, d’une part, attestent de la popularité de la pièce et permettent d’autre part, à la production d’évaluer l’impact du spectacle sur l’auditoire. Quand il s’agit des représentations en salle, la Cie Téatlari – Théâtre des cultures créoles sollicite les réactions des spectateurs par Sms et/ou par email, leur demandant d’accepter de faire parvenir leurs réactions.
Quelques jours après la dernière représentation au Théâtre Aimé Césaire, voici les réactions de spectateurs aux représentations des 26,27 et 28 février 2015.
…« Laisse tomber la neige ou quand la frontière entre la raison et la folie semble ne tenir qu’à un fil ».
Cette pièce dont la mise en scène remarquable de sobriété de José Alpha, nous donne à réfléchir sur la complexité de la nature humaine. On se laisse rapidement emporter par ce monologue dans les méandres de nos propres ambivalences.
La talentueuse Elisabeth LAMEYNARDIE interprète Antonia avec un réalisme et une grande maîtrise de son art qui fait qu’à la fin de la pièce le spectateur se préoccupe de savoir comment elle va atterrir et sortir de son personnage.
En effet, avec sa voix, avec son corps, avec sa chevelure, avec son souffle, avec ses mimiques, avec ses gestes, ses postures, ses déplacements, on la sent totalement habitée par Antonia au point d’en être soi-même quelque peu déstabilisé. Tout au long de la pièce elle se montre à la fois touchante, drôle, tragique, cruelle, attendrissante, poignante, passionnée, impitoyable, cynique, méprisante, émouvante et tellement, tellement FEMME.
Un moment exceptionnel, un bouleversement de nos schémas conformistes, une plongée dans ce que le théâtre peut avoir de meilleur.
O.P.C
… Je veux féliciter la troupe théâtrale pour le travail accompli au montage et à la réalisation de la pièce « laisse tomber la neige » de Pierrette Dupoyet. La mise en scène était parfaite. La représentation des cauchemars m’a beaucoup plu. Le décor était évident, il ne manquait rien, et cela a permis de se concentrer sur l’interprétation de la comédienne. Il faut dire aussi que le texte est magnifique !! L’interprétation de Mme LAMEYNARDIE était courageuse, professionnelle et très attachante. Une belle performance ! Peut être, vers la fin, un peu trop agressive (…) Je m’explique: durant toute la représentation, l’attention du spectateur est concentrée au maximim sur le jeu et les paroles de la comédienne. Son jeu avec ses cheveux, ses mouvements sur et autour de lit sont captivants, c’est un point très fort. Mais vers la fin, cette extrême concentration qui n’est jamais distraite car on écoute le texte et on réfléchit en même temps qu’Antonia sur la possibilité qu’elle soit effectivement folle, il me semble qu’un silence, un temps de calme, de douceur serait nécessaire. Pour plusieurs raisons: premièrement, pour déstresser le spectateur-auditeur, et pour attirer de la compassion pour Antonia, car à la voir tout le temps dans le mouvement, dans la dynamique, on ne retient que l’idée préméditée de la vengeance et on oublie la place de l’amour. Or après tout, c’est l’amour qui l’a rendue folle ! folle d’amour, folle de jalousie, folle de rage, folle à tuer, folle tout court, mais tellement humaine, tellement ordinaire, tellement femme !Bravo M.Alpha et continuez à nous faire réfléchir en nous distrayant…
GF
… Juste quelques mots à l’actrice E. Lameynardie (…) vous avez vraiment donné du plaisir aux spectateurs, moi y compris. Vous avez su conquérir le public par une maîtrise du texte et d’une belle présence en scène. On peut dire que vous avez bien servi l’auteur et votre interprétation donne envie de lire un texte beau et riche. Au metteur en scène qui a su donner vie à ce texte grâce à ce changement de rythmes et de tons qui fait que le spectateur n’est jamais las. Il se passe toujours quelque chose sur la scène qui surprend ! Je vois la comédienne pour la première fois dans un quasi-one woman show, libre avec « la voix égale ». Elle a pris place parmi les meilleures comédiennes de la cité, comme l’a dit dans la salle, une comédienne bien connue Mais, bien entendu, ce n’est pas cela le plus important. Donner aux gens, au public à goûter et à toucher le beau, l’esthétique par cette formidable transcendance, ce n’est pas donné à tout le monde. Mme Lameynardie fait partie de ces artistes capables d’émouvoir sans fioriture et sans maquillage. J’ai été heureux d’être là.
J.R
…La pièce « Laisse tomber la neige » de Pierrette Dupoyet est une pièce poignante, tragique, magnifiquement interprétée par Elisabeth Lameynardie. Un texte aux apparences simples où les mots s’entrechoquent avec les maux. Une écriture incisive et une mise en scène juste, sans artifices qui laisse la place à l’actrice mais aussi au spectateur. Il faut souligner également le magnifique travail de Peggy Fargues avec les images de cauchemar dans lesquelles Antonia est enfermée. J’ai une préférence pour l’image de la nasse qui souligne à mon sens très bien l’enfermement mais aussi le réseau neurologique complexe du cerveau… et celle des yeux qui viennent nous observer de l’intérieur …
B
… l’analyse que je ferai de cette pièce de théâtre donnée au public par Mme Lameynardie. sera celle d’une spectatrice simple et sensible, ouverte à toutes les problématiques de la vie. D’abord, lorsque je vais voir un film ou une pièce de théâtre, je fais en sorte de n’avoir lu aucune critique, aucun exposé du sujet traité. J’aime entrer dans l’inconnu pour mieux en savourer la subtilité (…) Une scène au décor nu comme est nue la vie d’une malheureuse personne en milieu psychiatrique. Un lit d’une blancheur immaculée, un rideau-mur sans fenêtre. L’enfermement dans un univers clos où les gens se déplacent comme des ombres et cette femme brillante, qui a commis un crime… Elle a tué une femme, une femme ordinaire, pour avoir été éconduite par le mari de celle-ci. La criminelle, belle, position sociale élevée au-dessus de tout soupçon, amoureuse d’un homme qui n’a pas pris au sérieux cet amour, a décidé d’organiser sa vengeance. Elle a pris du temps et l’on découvre petit à petit la trame de sa mise en scène qui d’un certain point de vue démontre qu’une telle machination relève de la folie d’Amour. C’est elle qui en effet a trouvé une bonne épouse pour cet homme et qui petit à petit s’insinue dans la vie du couple. Elle prépare en quelque sorte sa mise en accusation mais aussi l’excuse de la folie en créant à plusieurs reprises des scènes de folie lors de réunions amicales.
Elle fait de ses amis à leur insu, les futurs témoins à charge. Le spectateur comprend vite qu’elle a été jugée irresponsable et que son acte lui vaut la prison sanitaire à vie (…) voilà cette femme qui pendant une heure et demi entame un plaidoyer devant le jury d’experts dont on imagine qu’ils doivent se prononcer sur son statut d’hospitalisée d’Office. Elle va disséquer son acte, un acte prémédité, le revendiquer, et s’interroger avec terreur en comprenant qu’elle s’est elle-même piégée dans un univers de silences, de cris, de hurlements sans âme des patients qui sont désormais sa compagnie. Tour à tour, elle va crier sa folie d’être coincée dans le tunnel de la non-existence. Elle hurle sa lucidité, son envie de liberté, son besoin de communication. Elle crie sa douleur et refait son procès. Elle supplie d’être incarcérée normalement comme toute criminelle car la prison serait pour elle sa planche de salut.
Le jeu de l’actrice est remarquable. Nous sommes emmenés dans sa folie d’Amour , dans sa révolte, dans le piège qu’elle s’est tendu, qui sait si ce ne fut pas par péché d’orgueil : se sachant intelligente, au-dessus de la médiocrité, elle a cru qu’elle contrôlait tout parfaitement et le public est peiné lorsqu’elle découvre avec terreur qu’elle pouvait être vraiment atteinte de folie. La belle et talentueuse Élisabeth Lameynardie est certainement une personne aux qualités exceptionnelles car à interpréter trois soirs de suite une telle personnalité, le danger était grand á mon humble avis et il lui a fallu prendre des distances par rapport à ce personnage. Très belle prestation. Tous mes vœux de long chemin dans cette voie magnifique du Théâtre
C.N
… Comment rester insensible à la magnifique prestation de Mme Elisabeth Lameynardie ?
La folie est tellement bien interprétée, que nous restons hantée par des mots et, des gestes si réels. C’est une pièce qui déstabilise. Qu’est ce que la folie ? Qui touche t-elle ? Suis-je concernée ?
Alors arrive un flot de questions sur soi, sur le basculement possible vers le vide, sur l’éventuelle perte de soi. Tout cela serait-il latent en nous ?
Cette frontière entre ce qui doit se faire et, ce qui ne se fait pas est si mince !
On frôle la folie, on la simule et, on bascule dedans… J’ai aimé cette pièce pour ce côté imprévisible de l’être humain. Il y a de l’humour aussi, de la moquerie, du dédain. Et, puis cette peur, la peur de se perdre à tout jamais qui arrive de façon perfide pour avoir le dernier mot.
Les émotions portées par le personnage de Antonia, transpercent, transpirent même pour rejaillir sur le spectateur. Sa peau, son regard, ses mains, ses gestes répétitifs, sa voix…nous percutent et, résonnent en nous, encore et encore… Merci à vous tous pour ce moment très fort…
B.S